Déçus, nous rejoignons Tromsø à trois heures du matin, accompagnés de ce bruit intermittent. Une lumière fabuleuse illumine les montagnes et la ville d’un éclairage incroyablement dorée. Le lendemain impossible de trouver le représentant Volvo. Il a disparu. Un marin croisé sur le terre-plein du port, nous explique que l’atelier est clos depuis bientôt un an. Nous voilà bien ennuyés.
Déjà le 15 juillet. La saison de navigation au Spitzberg n’est pas encore achevée, mais un doute sur la fiabilité de l’inverseur persiste malgré tout. La prudence recommande de remettre la visite du Spitzberg à l’année prochaine. Dépités nous décidons de poursuivre par les îles Lofoten. Chemin à rebourg vers Engenes et de là traversée du Vestfjorden vers Lodingen port des Vesteralen, au nord des Lofoten. En face de l’étrave s’élève un mur de montagnes. Ces montagnes hautes et escarpées dominent majestueusement la mer et s’y enfoncent verticalement en déposant dans les couloirs de navigation des amas rocheux à fleur d’eau. La concentration est permanente chez le navigateur. Repérer les balises, souvent un simple tube de ferraille, qui émerge de la mer ou planté sur un caillou, n’est pas toujours un jeu facile.
L’approche de Lodingen ne pose aucun problème particulier. Deux grands pontons dans la baie, perpendiculaires à la grève attendent les bateaux de passage. A quai à flanc de montagne, d’énormes chalutiers, machines en marchent, sont en attente. Il y a bien un port de plaisance au sud de la baie et plus abrité que celle-là, mais il est bien trop petit et trop peu profond pour Noème. Un voilier anglais y rentrera après notre arrivée mais nous rejoindra bien vite sur le ponton extérieur. Quelques instants plus tard deux voiliers norvégiens en provenance de Narvik s’amarrent et les gamins du bord s’empressent de descendre canne à pêche en main, pour aller taquiner la morue ou le flétan. La pêche est une activité extrêmement répandue dans la population norvégienne. Au cours de ce périple nous aurons vu un nombre considérable de petites embarcations dérivant au fil de l’eau, une ou plusieurs personnes à bord, homme, femme, adultes ou enfants, lignes de pêche à la main.
La ville, de peu d’importance, offre un visage désolé aux passants. Les abords sont beaucoup plus agréables et en montant sur les chemins apparaît la beauté de la côte, avec en toile de fond, embrumée, la Norvège continentale.
Le trajet de Lodingen à Svolvᴂr capitale des Lofoten par voie de mer est fantastique, invraisemblable de beauté. Les jeux de lumières favorisés par l’alternance, d’un temps maussade bruineux et d’éclaircies ensoleillées lumineuses jouant sur la couleur de la mer, des roches et des sommets enneigés, procurent des moments d’irréalité. Les courants, les dangers disséminés, le sifflement du vent, renforcent la sensation de beauté pesante que dégage le paysage dans lequel nous évoluons. L’approche de Svolvᴂr se fait dans un véritable dédale de cailloux, le chenal étroit mène au centre ville où nous prenons place au milieu d’autres yachts. Cela fait bien longtemps que nous n’en n’avons vu autant. Svolvᴂr est visiblement un lieu de rendez-vous pour nombre d’entre-eux et de plus c'est la fin de la semaine. Au moment de la manœuvre d’appontement, en passant la marche arrière, un bruit strident et métallique nous rappelle que l’inverseur n’est peut-être plus très fiable.
Svolvaer construite sur plusieurs îles reliées entre-elles par des routes ou des ponts, dominée de montagnes granitiques aux crêtes enneigées est la plus grande ville des Lofoten. Le port est animé mais certainement moins que l’hiver lors de la pêche à la morue quand les cabillauds migrent de la mer de Barents vers les eaux des Lofoten pour venir y frayer. D’ailleurs quantité de morutiers à quai, désarmés, attendent la prochaine saison de pêche.
Des bâtiments modernes en béton côtoient de vieilles demeures en bois recouvertes de peintures vives où le rouge domine. Parmi celles-ci des « rorbu » et des « sjøhus » cabanes d’hiver et dortoirs, reconvertis en hébergements touristiques, qui servaient jadis aux pêcheurs de lieux de repos au cours des campagnes de pêches hivernales. Une lumière cristalline et chaude enflamme la ville au fil d’un interminable crépuscule. Cette lumière si singulière attire les artistes du monde entier comme en témoignent les nombreuses galeries qui exposent leurs œuvres.
De nombreuses promenades mènent tout autour de la ville sur des chemins escarpés avec des vues splendides sur cet environnement majestueux. Le village de Kabelvåg, cinq kilomètres à l’ouest est rallié par un chemin côtier désert desservant le littoral. Au détour du chemin surgit une imposante église en bois peint, dominant l’espace environnant de sa haute stature. Construite au dix-neuvième siècle, l’église de Vågen deviendra la cathédrale des Lofoten au vingtième siècle. Un peu plus loin Kabelvåg installé au milieu de rocs et de canaux resserrés, de quais en bois bordés d’entrepôts désaffectés procure une sensation de sérénité indéfectible. Un kilomètre plus loin, à Storvågan, l’aquarium des Lofoten expose des échantillons de la faune marine locale dont l’incontournable morue.
Reconstruite en 1950 après sa destruction complète par un bombardement au cours de la seconde guerre mondiale, elle ne présente pas d’intérêts majeurs. En attente d'une accalmie pour pousser plus avant.
Le 6 juillet est une nouvelle journée à naviguer au près, ballotés dans un clapot court et désagréable. Décidemment cela devient une habitude. Le ras-le-bol gagne l’équipage et celui-ci décide d’écourter la navigation du jour. Arrêt à Skutvik petit abri au milieu de montagne, qui offre un havre de paix pour la soirée attaché à l’embarcadère du Ferry, en espérant que le dernier soit passé sinon il faudra manœuvrer pour lui rendre sa place. Finalement nous ne serons pas dérangés.
Le 7 juillet le vent s’est calmé, nous filons à 6 h30 bien avant qu’un ferry ne vienne nous déloger. Belle journée et navigation paisible pour ce parcours. Mouillage à Engenes petit port abri très joli. Marche vers une église en bois aperçue depuis le pont de Noème et située sur une hauteur offrant une perspective remarquable des montagnes et des fjords avoisinants éclairée d’une luminosité cristalline.
Le 8 juillet nous abordons Tromsø un des objectifs que nous nous étions fixé. Tromsø appelé la « Paris du nord » ou encore la « Porte de L’Arctique ». C’est de cette cité que Ronald Amundsen, explorateur des régions polaires, organisa plusieurs expéditions vers le pôle nord. Le centre-ville est implanté sur l’île de Tromsøya et relié aux banlieues par des ponts. Une grande ville universitaire animée et cosmopolite, (130 nationalités et 66000 habitants) aux nombreuses manifestations culturelles. Une superbe bibliothèque entièrement vitrée, plusieurs musées dont le musée arctique. Noème a pris place sur la panne la plus proche du centre ville.
Peu de voiliers à notre grand étonnement. Le règlement de l’emplacement se fait par un système de parcmètre, le ticket doit être positionné de façon visible pour le contrôleur qui n’oublie pas de passer. Le ticket affiché derrière un hublot, nous partons à la découverte de Tromsø et sillonnons les rues comme à notre habitude.
En retard sur le programme nous décidons de ne pas nous attarder. La cambuse est approvisionnée en produits frais et le plein de gazole effectué. Puis direction la station météorologique où deux météorologues prennent le temps de discuter et donnent les prévisions météorologiques pour les 5 jours à venir ainsi qu’une carte des glaces en vue de la traversée vers le Spitzberg. Les prévisions annoncent peu de vent sur zone, au maximum un 6 Beaufort à mi-parcours. Le 10 juillet dans l’après-midi route en direction de Torsvag un port situé à 35 milles au nord de Tromsø par 70°13’ latitude nord et 19°30’ de longitude est. Vers 22 heures l’entrée du port se profile entre les récifs, en sort un bateau à moteur surchargé de pêcheurs, qui agitant leurs bras à notre passage, le font tanguer sérieusement. Les passagers modèrent vite leur enthousiasme, ils ne tiennent pas à chavirer dans cette eau glaciale. Cet épisode de sympathie était probablement favorisé par la consommation de canettes de bière que nous apercevons vides dans la cale, accumulées sur les lignes de pêche.
Sans encombre Noème se faufile dans la passe d’entrée et gagne un appontement en bois. Le port a été aménagé dans une anse naturelle et une digue construite entre son pourtour et une monumentale masse rocheuse isolée en pleine mer délimitant ainsi un espace démesuré par rapport au trafic maritime. Les amarres sont tournées aux bittes installées sur le quai en bois. Une odeur douçâtre flotte associée à la présence d’une immense usine de traitement du poisson aménagée sur les docks. A proximité, se dressent sur un plateau rocheux en bordure de mer, de logs séchoirs à poissons recouverts de filets où pendent des milliers de têtes de morues séchées exposées au vent, alors qu’au-dessus, goélands et mouettes tournoient en paillant dans les derniers rayons d’un soleil qui ne se couchera pas.
De bonne heure le lendemain matin cap sur la pointe sud du Svalbard. Soleil resplendissant, température de 14°C, mer plate et moteur. Une heure plus tard la proue se perd dans une brume épaisse. Et là nous entendons un bruit métallique bref et anormal provenant du moteur. Le bruit se reproduit à plusieurs reprises avec peut-être une légère modification du régime moteur. Inquiets nous ouvrons le coffre moteur et tendons l’oreille. Effectivement quelques événements sont en train de survenir dans ce tas de ferraille. L’anomalie reste discrète et semble localisée au niveau de l’inverseur. Le moteur tourne pour sa part normalement. Noème avance comme si de rien n’était. Que faire ? Plusieurs heures durant nous tergiversons sur la décision à prendre. Finalement nous optons pour un demi-tour, la prudence l’emporte sur les autres considérations. Continuer et prendre le risque de se retrouver en panne de moteur au Svalbard nous apparaît déraisonnable.
Voyage en Norvège été 2009
Après un week-end enchanteur, comme nous avons aperçu au cours de nos balades un agent Volvo Penta, nous allons demander un autre avis pour trancher la question de l’inverseur. Le responsable du chantier nous propose une vérification immédiate ce que nous acceptons. Retour au port pour amener Noème au chantier. Un employé monte à bord et nous exécutons plusieurs manœuvres à sa demande. Le verdict tombe : tout va bien. Etonnés nous insistons, il suggère que l’hélice pourrait ou présenter un problème ou avoir un cordage enroulé autour du moyeu. Combinaison rapidement enfilée (eau à 8° C) et mise à l’eau du marsouin. La vérification ne donne rien. A priori pas d’explication. Le patron ne nous fait rien régler et nous repartons avec nos doutes.
Descente la côte est des Lofoten et visite successive de Henningvᴂr surnommée la Venise du nord, Nusfjord au fond d’un minuscule fjord puis Reine et Moskenes. Tous de petits ports insérés dans des baies improbables au pied de ce mur montagneux qui fait les Lofoten. Reine est assurément le plus remarquable d’entre eux. Les Norvégiens l’ont élu « plus beau village de Norvège ». Une randonnée sur les pitons alentours permet de dominer Reine, et d’admirer cette crique paisible au fond de ce fjord au décor féérique. Il ne doit pas en être de même aux mois d’hiver.
A l’extrémité des Lofoten cap sur Sandviken, sur la côte ouest de la Norvège par un temps de chien. La traversée du Vestfjorden et l’atterrissage sur l’île de Sandviken se fera au radar. Le brouillard se dispersera par bancs entiers à l’instant où nous pénétrons dans la crique qui tient lieu de port et où quelques aménagements ont été réalisés. Pas un bruit ne s’élève de l’île. Le silence est parfois troublé brièvement par le bruit d’un moteur marin ou le criaillement d’oiseaux marins. Elle est si petite que pas une seule route n’a été construite, seul des sentiers la parcourent. Les rares insulaires croisés se déplacent à pied ou en vélo, indolents. Le toit de certaines maisons est recouvert, pour une meilleur isolation, de tourbe et d’herbe. De la morue sèche à la devanture de hangar à bateaux. Pas une épicerie, pas un magasin. Un refuge pour un reconstituant repos loin de toute agitation dans des conditions d’isolation absolue. Ne rien oublié est impératif si un séjour est décidé en ce lieu.
Le lendemain le chemin du retour continue. Nesna, Brønnøysund, Rorvik à nouveau, Stokksund et Uthaug. La journée du trente juillet fut épique. Dans l’après-midi alors que soufflait trente cinq nœuds de vent et que nous naviguions dans une mer heurtée et très courte, le bloqueur de la bosse de l’enrouleur s’ouvrit libérant la totalité du yankee. Noème partit à l’abattée et se coucha. Il fallu libérer le pilote, reprendre la barre pour remonter au vent au milieu de cailloux sardoniques. La tension sur la bosse de l’enrouleur était telle qu’enrouler le yankee s’avéra difficile et ne se fit que très progressivement, chahuté par les vagues. Le yankee enroulé et le vent toujours aussi violent, Uthaug fut choisi pour prochaine étape.
En pleine manœuvre dans le port, par trente nœuds de vent avec rafales, impossible de passer la marche arrière. Finalement nous réussissons à venir à couple d’un chalutier en réparation. Noème immobilisé au flanc du chalutier nous sollicitons le levier de commande moteur. La marche arrière daigne s’enclencher mais dans un tel bruit de casserole que le moteur est stoppé sur le champ. Nos craintes se confirment. Que faire ? Nous avons une connexion Wifi à bord. Un revendeur Volvo est trouvé sur internet. Il est à Trondheim, troisième ville du pays située sur un fjord à l’intérieur des terres, à soixante milles de notre panne. Pour le moment le moteur fonctionne toujours correctement en marche avant. Le vent tombera le lendemain et nous partirons vers Trondheim espérant ne pas avoir à solliciter le moteur. Belle journée et belle brise pour rejoindre Trondheim. Trajet sans ennuis. Malheureusement dans la marina de Trondheim nous ne nous engageons pas dans la bonne track, un plaisancier nous indique que les places visiteurs sont à l’opposé de l’endroit où Noème se trouve. Obligés d’enclencher la marche arrière pour le dégager de la panne, l’inverseur donne l’impression qu’il va exploser. Une fois dégagé, un voilier de notre taille est repéré, puis abordé en marche avant et Noème immobilisé. Ouf pas de casse.
Le lendemain visite au représentant Volvo situé à l’autre bout de la ville à une demi-heure de marche. Après quelques explications il nous dit savoir d’où vient le problème. Par contre nous refusons de nous rendre au moteur à son atelier situé dans une darse au fond du port commercial. Noème sera remorqué. Dans la matinée c’est fait. Le patron du chantier emprunte la descente et s’installe à côté du coffre moteur ouvert pour écouter et prendre une éventuelle décision. Mise en route du moteur et vous le croirez ou non mais le passage de la marche avant et arrière est normal, et ne provoque quasiment aucun bruit anormal à part un petit chuintement. Le patron pense qu’une pièce entre le moteur et l’inverseur est responsable de ces ennuis, nous non mais bon. Le mécanicien désaccouple, à flot, l’inverseur du moteur. Le démontage de la pièce ne donne rien. Nous reparlons de l’inverseur et insistons un peu. Comme nous sommes en fin de journée c’est l’heure de la débauche. La suite des travaux est remise au lendemain. Nous quittons le chantier et allons explorer Trondheim l’ancienne capitale et grand centre universitaire. Le centre-ville construit sur une grande péninsule, à l’embouchure de la rivière Nidelva a été transformé en port de plaisance où des milliers de bateaux petits et grands, à moteur ou à voiles, antiques ou non, se balancent mollement au bout de leurs filins. La ville, remarquablement fleurie, au riche passé médiéval a été réhabilitée. Les vieux entrepôts transformés en habitations et commerces divers. Le tout lui donne un aspect propret et convivial agréable Cela nous aidera à supporter notre séjour qui va se prolonger mais nous ne le savons pas encore.
Le lendemain le chef arrive, accompagné d’un mécanicien, celui qui le matin avant d’embaucher est venu nous offrir une véritable baguette de pain à la française. Il nous explique que l’inverseur va être ouvert. Enfin, pensons-nous ! Le meccano nous racontera plus tard que son chef a appelé un responsable Volvo à Oslo et que celui-ci lui a enjoint de vérifier l’inverseur. Dès le couvercle ôté, les spectateurs voient surnager sur l’huile les éléments d’un roulement qui à volé en éclats. Devant cela il est décidé de remorquer Noème dans le bassin voisin et de procéder à sa mis au sec. L’inverseur démonté est examiné sur tous les engrenages. Des fragments du roulement se sont insinués un peu partout détériorant l’ensemble du saildrive. Tout est à changer. Noème reste une semaine suspendu à un « travelift » en attendant la fourniture du nouveau saildrive. S’ensuivent deux jours de travaux. Remise à l’eau et facture très salée : un peu plus de 10 000 euros pour l’ensemble des prestations. Nous confirmons que la Norvège est bien le pays le plus cher du monde. Mise en route du moteur : tout va bien, plus aucun bruit anormal.
Le 20 août, Trondheim disparait dans le sillage de Noème, sans trop de regrets après avoir épuisé tous les charmes de cette belle ville. Il apparaît que les premiers intervenants Volvo n’ont pas été tellement à la hauteur. Pour l’instant absence de bruits suspects lorsque le moteur est en route. Nous regrettions par moment notre demi-tour à Torsvag. Les regrets pour ne pas avoir osé continuer vers le Svalbard ont disparus en plus de quelques sous.
Vinvågen microscopique port au fond d’une crique encaissée est l’étape qui suit Trondheim. Paysage toujours aussi surprenant et ici bucolique rappelant les alpages suisses. Les prés parsemés de vaches aux mamelles hypertrophiées, s'étendent sur les versants des coteaux tout autour du mouillage. Une longue promenade à terre accompagné d'un épais silence, sans aucune rencontre, nous mènera sur les hauteurs des collines à la découverte d'un panorama d'iles multiples s'enfonçant sous l'horizon.
De là retour à Kristiansund. Puis Alesund, construite sur plusieurs îles reliées entre elles soit par des ponts soit par des tunnels, dont les édifices ont été reconstruits en 1907 dans un style architectural art nouveau conséquence d’un incendie qui avait ravagé la ville en 1904. Puis Måløy et enfin Flørø.
Au cours de ces derniers jours la météo s’est dégradée. Il faut attendre une bonne fenêtre météo pour la traversée de la Mer du Nord vers les Shetland. Une possibilité s‘offre pour le 26 août, certains bulletins annonce un 6 sur la zone pour la nuit, d’autres un 7. Nous mettons les voiles en début de matinée. Le début se déroule bien. Petit largue le speedo annonce 7.5 à 8 nœuds dans 20 nœuds de vent établi. En fin de soirée l’intensité du vent monte à 25 nœuds, toujours de w-n-w. Réduction de la voilure. La nuit tombe, voilà la zone de plateformes pétrolières. Elles sont illuminées comme de véritables guirlandes de noël. L’intensité du vent forcit et atteint 35 nœuds sans trop de rafales. La nuit devient d’encre. Une forte pluie tombe, balayée par les bourrasques elle nous aveugle. Un coup d’œil sur le navtex mais aucun nouveau bulletin. Voici Noème sous trinquette et grand-voile à trois ris. La mer se creuse et déferle, les vagues assaillent le pont. Le vent rugit. Noème équilibré, sous pilote, poursuit sa route sans broncher. Nous sommes prêts à reprendre la barre si le pilote décroche. A l’intérieur un calme relatif règne et les soubresauts du voilier semblent atténués. Au bout de quelques heures la mer devient croisée et chaotique, les vagues nées de ce coup de vent de sud-sud ouest croisent la houle résiduelle mais encore importante du coup de vent de nord-ouest de la veille. Ca secoue ferme. A l’aube le vent décroit et un bulletin au navtex nous annonce sur Viking un fort coup de vent. Il était temps. La mer reste agitée, le vent continu à décroitre et dans l’après-midi tombe totalement. Le moteur sera de la partie pour la fin du trajet. Débarquement dans un port de Lerwick vide. Le grand ponton est pour nous tout seul. Un temps détestable va s’installer pour plusieurs jours. Kirkwall sera rejoint dans une courte fenêtre météo une semaine plus tard. Le lendemain de l'arrivée à Kirkwall nouvel épisode de mauvais temps avec des vents de 35 à 40 nœuds. Le départ de Kirkwall est ensoleillé mais pas pour longtemps. Quelques heures plus tard le vent auquel se joint une bruine froide et pénétrante, sera bout jusqu’à Wick. Une colonie de phoques nous croise, de nombreuses têtes, aux grands yeux étonnement tristes, émergent et suivent du regard un long moment avant de disparaitre dans les vagues Noème. En pénétrant dans le port de Wick à la nuit tombante nous n’apercevons pas la nouvelle marina qui est maintenant ouverte dans l’autre bassin. Nous amarrons Noème dans le premier bassin au même emplacement qu'à l'aller. Pas un passant sur les quais dans cette fin de journée pluvieuse et triste. Vite aux couchettes pour se réchauffer. Demain est la dernière étape, 68 miles jusqu’à Inverness, départ prévu à l’aube pour ne pas arriver tard dans la soirée. Le lendemain encore du vent dans le nez. Noème aime bien le près mais il y a des allures plus confortables pour l’équipage. Arrivée en soirée après une journée banale le 6 septembre. Deux jours plus tard un mémorable coup de vent passera sur l'Ecosse, 65 noeuds de vent, un force 11. Il était temps d'arriver à destination.
Installé à « Inverness Marina » Noème est désarmé, brossé, décapé, nettoyé à l’extérieur et à l’intérieur. Il va rester à ce poste tout l’hiver sous la garde du personnel en attendant notre retour prévu pour le prochain mois d’avril.
Voyage en Norvège été 2009